Violences faites aux femmes et aux filles : l'UNICEF sensibilise et renforce l'engagement de son personnel  | Crédit photo : ME
Violences faites aux femmes et aux filles : l'UNICEF sensibilise et renforce l'engagement de son personnel | Crédit photo : ME

Dans le cadre de la campagne des 16 jours d'activisme contre la violence basée sur le genre, l'UNICEF a organisé une table ronde le 10 décembre 2024 à Yaoundé, date de clôture des activités y relatives. L'objectif était de renforcer l'engagement de son personnel sur la question des violences faites aux femmes et aux filles, en partageant des connaissances et des expériences pratiques, en discutant des stratégies de réponses  efficaces et en échangeant sur ce que chaque citoyen peut faire pour lutter contre ce fléau. Le panel constitué d’experts du ministère de la Promotion de la Femme et de la Famille, de la société civile et de l'UNICEF, a édifié les participants sur cette problématique cruciale qui persiste telle une nébuleuse malgré les actions concertées des OSC (Organisations de la société civile), des organisations internationales, des gouvernements et même des médias pour en finir avec cette problématique.

« Vers 30 ans de déclaration du programme d'action de Beijing :  s'unir pour mettre fin à la violence à l'égard des femmes »,  c'est le thème mondial de la campagne 2024 qui vient de s'achever. Une campagne qui s'est déroulée dans un contexte africain fortement marqué par les violences à l'égard des femmes et des filles. Les statistiques renseignent  que 40 % et 65 % de femmes, respectivement en Afrique de l'Ouest et en Afrique centrale, subissent des violences. « Derrière tous ces chiffres, il y a des visages, des souffrances et il y a une responsabilité  en tant que citoyen, en tant qu'individu à contribuer, à dire non à toutes ces violences auxquelles on fait face tous les jours », a rappelé Dr Patricia Nororaldo de l'UNICEF.

La campagne des 16 jours d'activisme est utilisée comme stratégie d'organisation par des individus, des organisations et des gouvernements  pour plaider en faveur de la prévention  et de l'élimination de la violence  faite aux femmes et aux filles. Le personnel de l'UNICEF a été appelé à  agir chacun à  son niveau et à s'opposer à  la violence. Dr Nororaldo a insisté sur le fait qu'il faut éviter que les actes de violence se normalisent : « Qu'on soit dans une organisation ou pas, il faut dénoncer toutes formes de violences. Il y a encore des gens qui n'osent pas en parler. Si autour de vous, il y a une personne qui ose en parler et qui sollicite qu'on en parle, ça aide les victimes, les survivants ».

Les statistiques à disposition renseignent également qu’une femme sur trois dans le monde a subi une forme de violence au cours de sa vie. La violence basée sur le genre est omniprésente dans la société, à la maison, en milieu professionnel, dans les espaces publics. Dans les zones de conflits et de crises humanitaires, les femmes et les filles subissent des violences incommensurables. Elles sont abusées, violées, déshumanisées et tuées. L'UNICEF dit « trop, c'est trop » et appelle à la dénonciation.  Haingo Manga Ada, représentante de l'Association de lutte contre les violences faites aux femmes (ALVF), en a profité pour rappeler les difficultés qui sont les leurs : « Il  faut les moyens pour accompagner les victimes. Il faut recruter une assistante sociale, un juriste, un psychologue. En 2022, nous avons accompagné 122 victimes parce qu'on a reçu un financement. Mais quand il n'y a pas de financement, nous ne pouvons recevoir que 35 cas l'année ».

Malgré la ratification des cadres régionaux, la mise en œuvre de l'Agenda 2063 de l'Union africaine et de la Charte africaine des droits de l'homme et du peuple sur les droits de la femme en Afrique, la faible mise en œuvre des lois sur les violences à l'égard des femmes et des adolescents laisse les survivants avec peu d'accès à la justice. Une réalité qui laisse prospérer une culture de l'impunité. Thérèse Ngo Minyem est une femme handicapée qui a pris part à la table ronde, secrétaire de direction de profession,  elle a eu du mal à s'insérer dans la société à  cause de son handicap. Elle raconte son histoire, fortement marquée par des frustrations, des violences de toutes sortes, de l'enfance à l'age adulte en passant par l'adolescence. « C'est à l'âge de huit ans que je suis devenue handicapée. Alors que dans la famille tout le monde disait que l'école ne me servirait à rien, mes parents ont décidé de m'y envoyer. Sur le chemin de l'école, les autres enfants se moquaient de moi. A l'école malgré mes performances, les enseignantes me marginalisaient et me mettaient toujours à l'écart. J'étais toujours au fond de la classe. Quand j'ai fini l'école, trouver un emploi n'était pas du tout chose facile. Dès que je me présentais à un entretien d'embauche, on me disait, désolé, ce travail n'est pas pour vous . Heureusement un expatrié américain a cru en moi et m'a donné ma chance malgré mon état physique. Aujourd'hui mes enfants sont victimes de toutes sortes de moqueries parce que leur maman est handicapée. On leur dit : « Vous n'avez même pas honte, votre maman est Kotto Bass [artiste musicien camerounais aujourd’hui décédé, devenu célèbre grâce à son infirmité physique et son talent, ndlr] ». Un témoignage poignant qui démontre à suffire que la femme handicapée est particulièrement vulnérable, d'abord parce qu'elle est une femme et en plus parce qu'elle est personne handicapée. Un groupe qui mérite une attention particulière lorsqu'on parle de violences basées sur le genre. L'ampleur de la violence dans la société camerounaise laisse à désirer. Depuis le début de l'année 2024, 67 cas de féminicides ont été enregistrés au Cameroun.

Le thème sus-évoqué, retenu pour l'année 2024, est un appel à la responsabilisation, un appel à  veiller à ce que la violence à l'égard des femmes et des filles soit criminalisée et que les survivants aient pleinement accès à la justice. C'est un appel à s'attaquer à la culture de l’impunité, à  la tension entre le droit coutumier et les lois formelles, en mettant l'accent sur la primauté du droit formel en premier recours.

Violences faites aux femmes et aux filles : l'UNICEF sensibilise et renforce l'engagement de son personnel | Crédit photo : ME
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